A Hanoi, une île appelée Baie du Milieu est en zone inondable non constructible située sous les ponts surplombant le Fleuve Rouge. Sa terre est sablonneuse, maraîchère et parsemée de bananiers.
Des personnes âgées, sans enfant, par conséquent avec peu de ressources ont trouvé refuge sur certaines rives saturées de radeaux et de cabanes où vivent les victimes collatérales de la pression immobilière.
Sur les chemins longeant le fleuve, je m'ouvre aux rencontres, à l’abri du temps, des règles et du continent.
Mon regard se dirige vers des hommes plonger dans l'eau trouble, chacun, ici, on vient se débarrasser de ses habits d’apparence et de son statut social, pour inventer d’autres manières de vivre ensemble. J’apprends plus tard qu’ils sont pharmacien, pompiste, acuponcteur, pêcheur, professeur d'université, scénariste, sans emploi, retraité, étudiant, vendeur, restaurateur, ouvrier du textile…
La Baie du Milieu est une zone à demi sauvage, où règne une grande diversité de masculinités, certains trouvent l’intimité dont ils ne jouiront jamais sous leur toit, d’autres assument une sexualité autorisée mais encore peu tolérée dans certains quartiers de la capitale.
D’autres viennent simplement perpétuer des traditions désormais interdites dans le pays, pour échapper à une société jugée ennuyeuse et aseptisée.
A la nuit tombée, quelques-un se rassemblent, ils partagent un repas composé de la pêche et de la récolte du jour. Ils chantent leur tristesse, exorcisant leur chagrin de ce temps gâché à vivre en dehors de la Baie du Milieu.
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